Conjoncture: 300% de subventions sur produits pétroliers hypothèque des projets d’investissements au Cameroun (FMI)

Conjoncture: 300% de subventions sur produits pétroliers hypothèque des projets d’investissements au Cameroun (FMI)

Comme on pouvait s’y attendre, le Fonds Monétaire International (FMI) n’est pas optimiste quant à l’augmentation des subventions du gouvernement camerounais sur les consommation de produits pétroliers afin de maintenir les prix à la pompe dans un contexte de hausse des prix mondiaux. L’institution de Bretton Woods a informé les pouvoirs publics lors des consultations dans le pays du 15 au 29 juin 2022 dans le cadre de la deuxième revue du plan économique et financier en cours avec le Cameroun.

En effet, selon le Fonds Monétaire International, une augmentation substantielle des subventions à la consommation de produits pétroliers est un frein à l’investissement public. « L’impact de la hausse des prix internationaux du pétrole sur le budget est mitigé, car la hausse des revenus pétroliers est compensée par une augmentation substantielle des subventions aux carburants (estimées à 2,9% du PIB, contre 0,5% en 2021) visant à maintenir inchangés les prix de détail administrés sur les carburants.

En conséquence, l’augmentation des coûts des subventions a été compensée par une diminution des autres dépenses, notamment celles destinées aux projets d’investissement a ainsi déclaré l’institution financière internationale dans un communiqué sur les consultations avec le gouvernement camerounais.

Apparemment, de l’avis des institutions de Bretton Woods, à travers la révision de la loi de finances de l’État en juin 2022, la dotation dédiée à la rubrique « subventions et contributions » est passée de 265,4 à 625,4 milliards, dont 480 milliards étaient destinés à subventionner cette consommation de produits pétroliers blancs (soit 300% du budget initial), l’Etat camerounais se prive ainsi de financements qui auraient pu servir à l’investissement public. En fait, une telle enveloppe est presque deux fois plus grande que la construction de l’autoroute de 38 km entre Kribi et Lolabé, ou le barrage de Lom Pangar, considéré comme l’infrastructure énergétique la plus stratégique du pays.

Une subvention a tête chercheuse

Partant de ce constat, et constatant qu’il est difficile de maintenir des coûts élevés des subventions aux carburants dans le cadre des prévisions actuelles des prix internationaux du pétrole, le FMI recommande explicitement au gouvernement camerounais de faire des efforts pour éliminer les subventions susmentionnées, avec pour conséquence l’augmentation des prix à la pompe. Il a été observé que cette recommandation n’aura pas d’impact direct sur le résultat de la deuxième revue de programme avec le Cameroun, qui conduira à l’approbation d’un appui budgétaire de 73,6 millions de dollars (un peu plus de 46 milliards de francs CFA) en juillet 2022 pour soutenir Cameroun. Cependant, elle peut être conditionnée à une conclusion positive du troisième examen.

Pour rappel, le FMI s’oppose depuis de nombreuses années au subventionnement des produits énergétiques en Afrique. Ceci, soutient l’institution, en raison de ce que non seulement elles déséquilibrent considérablement les budgets des États, mais aussi elles sont contre-productives pour l’économie, dans la mesure où « ces subventions profitent aux riches ».

Car selon le rapport d’enquête intitulé « réforme des subventions énergétiques en Afrique subsaharienne, expériences et enseignements », réalisé auprès des ménages dans neuf pays africains (Par Arze del Granado, Coady, et Gillingham, 2010), les ménages les plus pauvres consomment directement une part beaucoup plus faible des carburants et de l’électricité. En fait, les ménages de quintile de revenus le plus riche dépensent, par habitant, près de 20 fois plus au titre des carburants et de l’électricité que les ménages appartenant au quintile le plus pauvre (sauf dans le cas du kérosène, dont la consommation est uniformément répartie entre tous les ménages). Dans ce contexte, il n’est guère surprenant de constater que les subventions aux carburants et à l’électricité profitent essentiellement aux ménages mieux nantis.

Jules Anicet
Author: Jules Anicet

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